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L’AVEM ce n’est pas un visa, mais c’est tout comme

Maliens, Guinéens et Congolais sont désormais tenus de demander une autorisation pour se rendre au Maroc

(...) ce dispositif est surprenant et incompréhensible vu les relations cordiales entre le Royaume, Mali, la Guinée Conakry et le Congo Brazzaville. Certains n’ont pas hésité à considérer l’instauration de ce système comme un diktat de l’UE. « Cette mesure s’inscrit parfaitement dans la politique européenne de gestion de la migration qui a transformé les pays du Maghreb en de simples gendarmes chargés de surveiller et de contrôler les flux migratoires en provenance d’Afrique », nous a déclaré Ousman Diarra, président de l’Association malienne des expulsés qui pense que le Maroc a été le premier pays du Maghreb à avoir pris cette décision et il pense que celle-ci augure du fait que l’Algérie, la Tunisie et la Libye lui emboîteront le pas.

Désormais, les ressortissants du Mali, de la Guinée Conakry et du Congo Brazzaville seront obligés de se faire établir une « Autorisation électronique de voyage » (AVEM) avant de se rendre au Maroc. Un communiqué de la compagnie aérienne Royal Air Maroc daté du 30 octobre dernier et signé par son représentant régional au Gabon a indiqué que cette autorisation doit être demandée au minimum 96 heures avant la date du départ vers le Maroc via un site Internet inaccessible depuis le Royaume et que l’AVEM doit être présentée obligatoirement à l’aéroport au moment du départ. Une mesure qui suscite tellement d’interrogations vu l’opacité qui a entouré son élaboration et sa sélectivité.
En effet, aucune information n’a auparavant filtré sur le sujet et aucun débat n’a été engagé concernant sa raison d’être, ses procédures, sa gestion et pourquoi elle ne concerne que trois pays africains. Ainsi, est-il légitime de se demander qui sont les personnes qui seront autorisées à voyager et celles qui seront interdites d’accéder au territoire national et selon quels critères ? Les refus d’autorisation seront-ils motivés et objet de recours ou pas ? Les personnes qui voudraient se rendre au Maroc en cas d’urgence devront-elles attendre 96 heures pour avoir réponse à leur demande ? Et enfin, l’AVEM sera-t-elle appliquée aux seules compagnies aériennes ou à l’ensemble des transporteurs internationaux, même ceux qui assurent des liaisons routières par autocars ?
Le timing de l’instauration de cette mesure suscite également moult questions puisque cette décision intervient à quelques mois seulement de la conclusion d’un accord entre le Conseil de l’UE et le Parlement européen imposant aux ressortissants de pays tiers exemptés de visa de demander à l’avenir une autorisation de voyage en ligne avant de se rendre en Union européenne. Selon une dépêche de l’agence AFP, ce nouveau système européen d’autorisation de voyage (ETIAS), qui devrait être pleinement opérationnel en 2021, s’inspire de la procédure ESTA mise en place depuis 2009 aux Etats-Unis. L’ETIAS permettra donc des contrôles en amont de quelques 39 millions de voyageurs en provenance de plus de 60 pays qui sont exemptés du visa Schengen.
Pour obtenir une ETIAS, les ressortissants de ces pays tiers devront remplir un formulaire électronique avec leurs données personnelles, les informations reprises sur leur document de voyage, l’adresse de leur domicile ainsi que leurs coordonnées et le pays européen de première entrée prévue. Chaque demande introduite coûtera 7 euros au requérant. En cas de risque détecté par le système - qui effectuera une consultation automatique des bases de données européennes et d’Interpol -, la décision concernant toute autorisation préalable sera confiée à une unité ETIAS établie dans chaque Etat membre. Les personnes considérées comme présentant un risque élevé en termes de sécurité, de migration irrégulière ou d’épidémie pourront se voir refuser l’accès à l’espace Schengen. Lorsqu’une entrée sera refusée, la personne concernée sera informée des motifs de la décision prise à son encontre ainsi que de son droit à un recours.
Pour certains ressortissants des pays concernés par l’AVEM, ce dispositif est surprenant et incompréhensible vu les relations cordiales entre le Royaume, Mali, la Guinée Conakry et le Congo Brazzaville. Certains n’ont pas hésité à considérer l’instauration de ce système comme un diktat de l’UE. « Cette mesure s’inscrit parfaitement dans la politique européenne de gestion de la migration qui a transformé les pays du Maghreb en de simples gendarmes chargés de surveiller et de contrôler les flux migratoires en provenance d’Afrique », nous a déclaré Ousman Diarra, président de l’Association malienne des expulsés qui pense que le Maroc a été le premier pays du Maghreb à avoir pris cette décision et il pense que celle-ci augure du fait que l’Algérie, la Tunisie et la Libye lui emboîteront le pas.
« Nous sommes opposés à ce dispositif sécuritaire puisque le Royaume fait aujourd’hui partie de l’UA et il pourrait prochainement devenir membre de la CEDEAO qui défend la liberté de circulation entre les pays membres », nous a-t-il précisé. En fait, le Traité de la CEDEAO pour la libre circulation des personnes et des marchandises édicte que tout ressortissant de la Communauté a le droit de se déplacer librement d’un Etat à un autre sans entraves. L’article 2 du Protocole A/P1/5/79 sur la libre circulation des personnes, le droit de résidence et d’établissement, en ses principes généraux, dispose, de son côté, que : « Les citoyens de la Communauté ont le droit d’entrer, de réaliser et de s’établir sur le territoire des Etats membres. Le droit d’entrée, de résidence et d’établissement mentionné sera établi progressivement, au cours d’une période maximum de quinze (15) ans, à compter de l’entrée en vigueur définitive du présent protocole, par l’abolition de tous les obstacles à la libre circulation des personnes et au droit de résidence et d’établissement ». Comment le Maroc compte-t-il donc résoudre ce casse-tête juridique ? Affaire à suivre.

source : Libération (Maroc)

dimanche 4 novembre 2018

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